Stefan Bekier
(Introduction de Stefan Bekier à la 3ème partie de la réunion-débat du 20 février 2025 sur les conséquences de la présidence Trump pour l'Europe)
Quels défis pour l'Europe prise entre deux impérialismes néo-fascistes de Trump et de Poutine ?
Pourquoi l'avenir de l'Union européenne dépend en premier lieu de sa capacité à aider l'Ukraine à se libérer de l'envahisseur russe ?
Quelles sont les responsabilités de la gauche européenne dans cette nouvelle situation ?
Mon intervention ne prétend pas apporter des réponses achevées aux questions posées, difficiles et qui exigent des élaborations collectives. Ce sont donc juste quelques idées en vrac pour amorcer notre réflexion.
I.
▪ Trump, c'est encore pire que Neville Chamberlain après la capitulation devant Hitler à Munich en 1938, comme le note l'historien britannique Timothy Garton Ash dans The Guardian. Au moins Chamberlain essayait d'empêcher une guerre européenne majeure, alors que Trump procède en 24 heures à un renversement complet et brutal des alliances en pleine guerre. C'est un soutien direct à Poutine. La présidence Trump fait tout simplement passer l'Ukraine par pertes et profits. Et par là-même également les pays de l'Europe centrale et orientale (en premier lieu la Moldavie et la Roumanie), les pays baltes, les pays scandinaves (notamment la Finlande) - directement menacés par Poutine, qui proclame ouvertement son fantasme de reconstituer l'empire colonial du "monde russe" non seulement dans les frontières de l''ex-Union soviétique, mais aussi celles de l'ancien empire tsariste.
▪ Tout ceci avec l'abandon de l'Europe à l'impérialisme russe de la pire manière qui soit – soulignons-le encore une fois : en pleine guerre, et de manière typiquement colonialiste. Le trio néofasciste Trump-Vance-Musk veut mettre les pays européens à genoux, en situation de dépendance néocoloniale par rapport aux USA. Ils veulent les transformer en exécutants et gardiens de la "pax americana" en Ukraine. En effet, Trump voudrait que l'Europe y envoie ses troupes, mais pas l'Amérique... Odieux chantage.
▪ Le tout pour avoir les coudées franches au Moyen Orient et en Asie, face à la Chine, et aidé par son nouvel allié, Poutine. Trump vise à prendre possession des richesses minérales et fossiles de l'Ukraine, mais aussi de la Russie. En alliance avec Poutine, en promettant à ce criminel de guerre la levée immédiate des sanctions, un véritable balon d'oxygène de dernière minute pour une économie russe chancelante, dont les économistes prévoient l'effondrement dans quelques mois.
▪ Par un infâme mensonge et une pirouette propagandiste, Trump vient d'accuser l'Ukraine d'être elle la coupable de cette guerre, pas Poutine l'agresseur. C'est une reprise et une légitimation de toute l'intox typiquement stalinienne de la propagande du Kremlin.
II.
▪ L'Europe est à présent obligée d'approfondir, d'élargir son intégration. Sous peine de devenir dépendante de l'internationale néo-fasciste qui est en train de se constituer autour de l'axe Trump-Poutine.
▪ Et donc de revenir à ce qu'on appelle ses "valeurs", et de les défendre bec et ongles : à savoir en premier lieu la lutte pour la paix, la démocratie, les libertés, l'égalité hommes femmes, l'antiracisme, lutte contre toutes les discriminations, la défense de l'environnement, le droit des peuples petits et moyens à l'autodétermination, etc. L'axe Trump-Poutine et l'internationale fasciste sont en train de détruire tout l'héritage progressiste de l'après la Seconde guerre mondiale, bâti en réponse à la barbarie nazie.
▪ Mais pour ce faire, l'Europe se trouve devant un tournant historique : pour redevenir une véritable alternative à cette internationale fasciste trumpo-poutinienne qui se répand déjà en France, en Italie, en Allemagne, en Hongrie, l'Europe doit le plus rapidement possible abandonner sa doxa néolibérale du "marché libre et non faussé", de l'austérité, du chacun pour soi, de la loi du plus fort, et commencer à bâtir une politique de biens communs, de services publics de santé, d'éducation, de transport, de mobilité, de l'harmonisation vers le haut des standards salariaux, sociaux, environnementaux, démocratiques, d'élimination du chômage, etc.
▪ L'Europe doit aussi défendre bec et ongles le droit des peuples, tous les peuples, à l'autodétermination. L'ukrainien et le palestinien.
▪ Autrement dit, l'Europe doit être capable d'offrir à ses citoyens et au monde entier une perspective d'une autre société, désirable, humaine, sociale, démocratique, écologique. C'est ainsi seulement qu'elle pourra contrecarrer les démolisseurs Trump, Poutine, Musk, Milei, Meloni, Orban et bien d'autres.
▪ Et donc elle doit aller vers plus de fédéralisme, de mise en commun des moyens, d'investissements communs massifs, de rattrapage des régions les plus pauvres. Il n'est pas normal que le fédéralisme soit identifié seulement comme une idée de droite. La gauche a fait une erreur d'avoir abandonné cette thématique à la droite, et devrait reprendre l'initiative sur ce terrain également en tant qu'un élément important d'élaboration d'une politique de solidarité internationale, contraire à un repli national de chacun pour soi dans son propre pays.
▪ C'est la seule façon de dominer les forces centrifuges qui sont en train de la disloquer de l'intérieur, ce sur quoi misent les néofascistes, Poutine, et maintenant Trump. Ils vont tout faire pour opposer les pays européens les uns aux autres pour faire disloquer l'Union européenne.
▪ Et si par malheur, la France bascule lors des prochaines élections, alors avec toute cette amicale fasciste internationale qui se dessine, ce sera toute l'Europe qui basculera. C'est l'écologiste Marine Tondelier qui vient de le dire avant-hier, et elle a tout à fait raison.
▪ Et si l'AfD en Allemagne et/ou le RN en France arrivent au pouvoir, alors ce sera la fin de l'Union européenne, son éclatement ou sa soumission néocoloniale.
III.
▪ Et donc l'Europe doit aussi mutualiser les forces armées. Consacrer les budgets militaires non pas à vendre les armes à toutes les pires dictatures dans le monde – non ! Il faut arrêter les exportations d'armes à Israël, à l'Arabie Saoudite, et à d'autres régimes despotiques, et les réorienter pour les livrer au peuple ukrainien, lequel combat pour sa survie même en tant que nation, en tant que pays indépendant.
▪ Pas pour y faire intervenir nos armées - non ! Le peuple ukrainien sait parfaitement combattre et vaincre Poutine - à condition d'être dûment aidé, au lieu de se faire trahir et saboter par un délinquant milliardaire comme Trump. Mais pour intensifier, démultiplier l'aide militaire et financière à l'Ukraine - aide qui doit être désintéressée et non dans le but d'enrichir des oligarques de l'Ouest et de l'Est.
▪ Si des forces d'interposition devaient s'avérer indispensables contre Poutine, alors il faudrait que ce soit sous les auspices de l'ONU, les casques bleus. Donc l'Europe devrait promouvoir tout de suite, sans tarder, une véritable réforme de fond en comble, attendue depuis des années de l'ONU. Il faut commencer par éliminer enfin, une fois pour toutes, le système paralysant, colonial, de véto au Conseil de sécurité des cinq "grandes puissances" qui se disputent le partage de la planète et de ses ressources. Ces ressources doivent appartenir aux peuples qui vivent sur les terres concernées, et non à quelques milliardaires comme Trump ou Poutine. L'ONU doit rétablir le rôle central de son Assemblée générale des 193 Etats membres, avec le principe démocratique de base – un pays, une voix. Et là aussi l'Europe a un rôle essentiel à jouer, en s'alliant par exemple avec les pays du Sud pour imposer cette réforme cruciale de la gouvernance mondiale des peuples !
▪ Mais l'Europe doit aussi créer les Forces armées de l'Europe, comme l'a proposé et en a appelé le président Zelensky dans son discours historique à la conférence sur la sécurité de Munich il y a une semaine. Comme une armée commune de défense, de dissuasion face à Poutine (et Trump), pas comme une nouvelle armée d'agressions et de pillages des autres peuples.
IV.
▪ Tout cela pose des défis énormes pour toutes les forces de gauche en Europe. Des défis énormes mais enthousiasmants. Et possibles à relever, à condition de le vouloir et de s'en donner les moyens. On est à un de ces moments historiques où la gauche, en particulier occidentale, peut et doit se débarrasser des ses scories du passé, de ses tares sectaires paralysantes, de ses nationalismes et populismes dits "de gauche". La gauche doit agir de façon unie pour s'opposer à la déferlante néofasciste, mais en même temps en avançant un projet d'une autre Europe, démocratique, sociale, écologique, avec la liberté et l'indépendance de l'Ukraine comme son étendard réellement internationaliste. Il faut créer quelque chose qu'on pourrait appeler, en suivant l'exemple de la gauche française, un Nouveau Front Populaire de la Gauche Européenne.
▪ Dont un des axes devrait être la place centrale qu'il faut désormais donner aux forces de gauche de l'Ukraine, des autres pays d'Europe centrale et orientale, des Balkans, des pays Baltes et Scandinaves, de même que des secteurs pro-Ukraine de l'opposition démocratique et de gauche russe. Il faut en finir avec une gauche occidentalo-centrée.
V.
▪ La demande d'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne, déjà particulièrement pressante depuis le grand mouvement démocratique du Maïdan en 2013-2014 et l'annexion de la Crimée et d'une partie du Donbass, est devenue à présent une question immédiate, stratégique, existentielle pour le peuple ukrainien. Ajoutons que de la capacité de l'Union européenne et des pays qui la composent, à répondre de façon unie et décidée à ce défi historique, dépendra l'avenir même de l'Union européenne.
▪ C'est également un très grand défi pour toute la gauche européenne. Depuis vingt ans, c'est-à-dire depuis l'arrêt au milieu des années 2000 du si prometteur processus altermondialiste des Forums sociaux européens (FSE), la gauche européenne manque cruellement d'une orientation et coordination internationales, pour une autre Europe – sociale, écologique, démocratique, antiraciste, accueillante aux réfugiés, défendant le droit à l'autodétermination et l'indépendance des peuples menacés et agressés. A tel point que c'est devenu une des causes – pas la seule mais la principale – du développement au sein de la gauche occidentale des secteurs prônant des positions ouvertement hostiles à l'Ukraine, à son adhésion à l'UE. Des orientations protectionnistes, nationalistes, très proches sur la question de l'Ukraine de celles de l'extrême-droite dont Poutine est le champion. On le voit clairement lorsqu'une partie, d'ailleurs croissante, des eurodéputé.es de la gauche votent, avec l'extrême droite de l'hémicycle, contre les résolutions sur l'aide à l'Ukraine au Parlement européen.
▪ Or, c’est sans tarder qu’il faudrait accepter l’Ukraine, un pays agressé précisément parce qu’il a voulu entrer dans l’UE et qui demande à être protégé. Mais tout en commençant en même temps à réglementer par l’UE et les États membres les standards sociaux, salariaux et environnementaux, de manière à commencer dès le début la mise en œuvre d’une politique d’harmonisation vers le haut de ces standards.
▪ C’est un problème très délicat et pas facile du tout. Mais il faut que la gauche occidentale en discute et travaille en commun avec la gauche ukrainienne et celle des autres pays d'Europe centrale et orientale, scandinave et balkanique pour rechercher ensemble les solutions adéquates dans cette situation dramatique et inédite.
▪ C’est pourquoi aussi les syndicats des pays de l’UE et les syndicats ukrainiens ont un énorme rôle à jouer pour combattre ensemble les politiques néolibérales appliquées par les capitalistes à l’Ouest et à l’Est, pour délocaliser les productions vers les pays où les salaires sont plus bas. Adhérer à l’UE permettrait aux travailleurs ukrainiens et occidentaux de se battre ensemble pour. Par exemple, autour des revendications comme A travail égal salaire et prestations sociales égales, pour l'annulation de la dette ukrainienne et bien d'autres objectifs communs.
VI.
▪ Il faut convoquer un nouvel Forum Social Européen ! Pour discuter de tous cela, mais aussi pour établir une coordination européenne de la gauche. A Ensemble, nous l'avons déjà proposé à plusieurs reprises au cours de ces derniers trois ans, sans grand écho hélas. La majorité des anciens dirigeants du mouvement altermondialiste – pas tous heureusement, mais la majorité – gardent le silence, sont sur des positions campistes voire ouvertement poutinistes (comme en Italie, en Grèce ou en Amérique Latine), et se désintéressent des peuples de la partie centrale et orientale de l'Europe.
▪ Les campistes vont probablement s'aligner sur l'axe Trump-Poutine, et les poutinistes bien sûr aussi. C'est aujourd'hui une importante ligne de démarcation au sein de la gauche européenne
▪ A notre premier appel fin février 2022, quelques jours après le début de l'invasion à grande échelle de la Russie en Ukraine, les secteurs internationalistes de la gauche européenne ont commencé à se réunir et ont abouti très rapidement à la création du Réseau européen de solidarité avec l'Ukraine, le RESU/ENSU. Maintenant il faut aller plus loin.
- Trois événements européens pour la défense de l'Ukraine, en ce 3ème anniversaire de l'invasion russe à plein échelle, vont se tenir à Bruxelles les 26-27 mars prochains : la conférence organisée au Parlement européen à l'initiative des eurodéputé.es scandinaves et portugais, avec la participation des activistes du mouvement social ukrainien ; la conférence et des ateliers organisés par le Réseau européen de solidarité avec l'Ukraine, également avec la participation des organisations de gauche ukrainiennes ; et une rencontre organisée par la fondation Rosa Luxembourg. Nous devons bien sûr participer aux débats qui ne manqueront pas de s'y tenir sur comment la gauche européenne peut augmenter de manière décisive son soutien et aide à l'Ukraine, et plus largement comment peut-elle d'ores et déjà mener des luttes sociales, démocratiques et environnementales, tous ensemble.
- Il faudrait ensuite réunir toutes les forces de gauche syndicales, associatives et politiques en Europe qui soutiennent Ukraine, par exemple vers le mois de juin, pour discuter des possibilités de préparation d'un Forum social européen vers la fin 2025 ou début 2026.
VII.
▪ Ce ne seront que les premiers pas vers la renaissance d'un internationalisme et altermondialisme, que certains à gauche ont oublié ou défiguré, mais premiers pas indispensables pour avancer. Car c'est ainsi seulement que l'on pourra commencer à jeter les bases d'une politique réellement de gauche de construction d'une nouvelle Europe alternative au néolibéralisme et au retour en force du fascisme, ensemble à l'Est et à l'Ouest.
▪ On est dans une situation pas identique mais analogue à celle de l'Europe face au combat de la République espagnole contre le fascisme franquiste, soutenu par Hitler et Mussolini. Avec cette différence que la trahison de Munich de 1938 elle est déjà là, depuis deux mois. C'est la présidence Trump-Vance-Musk. Si l'Europe ne réussit pas à se ressaisir et se réorienter vers une politique progressiste, et si des forces progressistes en Russie et aux USA ne se réorganisent pas pour écarter du pouvoir les néo-fascistes dans ces deux pays, alors c'est très probable que l'Europe ira droit vers une nouvelle déflagration européenne et mondiale.
Merci de votre attention.
Le 20 février 2025
Stefan Bekier - ancien militant de l'opposition de gauche en Pologne, activiste du Réseau européen de solidarité avec l'Ukraine (RESU/ENSU), membre d'Ensemble!
Trois compléments du 11 mars 2025
▪ Je voudrais attirer l'attention sur ces très intéressantes réflexions de deux parlementaires de l'Alliance Rouge et Verte danoise , Jakob L. Ruggard, député au parlement danois, et Per Clausen, eurodéputé au Parlement européen de la même formation. Sous le titre "L’échec des États-Unis en Ukraine et en Europe exige de nouvelles solutions offensives de la part de la gauche", ils disent entre autres :
"L’Europe est entourée de superpuissances offensives et d’extrême droite avec la Russie d’un côté et les États-Unis de l’autre. Il n’y a pas d’autre solution que le rapprochement de l’Europe et de la région nordique. Mais c’est aussi une opportunité pour la gauche – car la sécurité de l’Europe doit aussi être assurée par des sociétés plus libres, plus vertes, plus égales et plus sûres."
▪ Il faut également signaler ici deux récentes contributions de Hanna Perekhoda, historienne ukrainienne originaire du Donbass, chercheuse à l'Université de Lausanne et militante du mouvement ukrainien de gauche Sotsialnyï Roukh (Mouvement social).
La première "Comment financer la défense européenne (et comment ne pas le faire)", publié en anglais sur son compte Facebook. Extrait :
"La gauche doit rejeter le faux choix entre justice sociale et sécurité nationale. La sécurité ne doit pas avoir pour prix la réduction des retraites ou des dépenses de santé, mais doit être assurée par une contribution équitable des milliardaires et des multinationales. La gauche doit se battre pour la justice fiscale, en supprimant les possibilités de fraude fiscale dont bénéficient les entreprises et en prenant des mesures contre les paradis fiscaux, y compris la Suisse.
Aucun pays européen ne peut se défendre seul. Au lieu que chaque nation augmente massivement son propre budget militaire, l’UE devrait renforcer ses mécanismes de sécurité collective. La sécurité énergétique doit être considérée comme faisant partie de la stratégie militaire : en réduisant la dépendance aux combustibles fossiles russes, nous pouvons empêcher un futur chantage économique de la part de ce pays. Par-dessus tout, la gauche doit faire pression de toute urgence pour la confiscation des actifs de l’État russe. Retarder cette décision par crainte de la réaction des élites financières ne fait qu’encourager les agresseurs."
La deuxième, c'est un entretien accordé au site VoxEurope sous le titre “La lutte pour la liberté en Ukraine est intimement liée à la lutte globale contre la montée des forces fascistes”, où Hanna dit entre autres ceci :
"…Vu de l’intérieur, l’UE peut être perçue comme un projet où les logiques de marché prennent le pas sur la justice sociale; où les décisions sont souvent prises à huis clos; et où les intérêts des grandes puissances économiques comme l’Allemagne imposent leurs priorités. Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que certain-s voient l’UE comme un obstacle dont il faut se débarrasser.
Mais pour les pays européens qui ne font pas partie de l’UE, et particulièrement pour l’Ukraine, elle incarne quelque chose de différent. “L’Europe” représente avant tout une aspiration, une idée d’un avenir où règnent l’Etat de droit, les libertés individuelles, et un certain niveau de prospérité. Ce qui est moins évident pour l’Europe occidentale, c’est qu’ici l’UE incarne une alternative à un modèle autoritaire et oppressif, un modèle que la Russie impose à ses voisins par la force.
Ainsi, pour les citoyens de l’UE, celle-ci est avant tout un projet économique. Mais pour ceux qui n’en font pas partie, l’UE est avant tout un projet culturel et civilisationnel. Qu’ils l’admirent ou la détestent, ses partisans comme ses adversaires en dehors de l’Union la traitent comme une force avant tout politique. La Russie, d’ailleurs, est explicite à cet égard : depuis au moins 2013, elle traite l’UE non pas comme un concurrent économique, mais comme un rival géopolitique et idéologique.
Cette dimension est devenue encore plus évidente en 2014, quand des Ukrainiens ont littéralement donné leur vie pour défendre l’avenir "européen" de leur pays. C’est un acte que beaucoup d’Européens regardaient avec incompréhension, voire avec condescendance ou pitié. Pourtant, pour ces manifestants, “l’Europe” n’était pas un espace économique, mais un symbole de dignité et de liberté."
▪ Finalement, il n'est pas inutile de rappeler ici le paragraphe concernant l'invasion russe de l'Ukraine dans le programme du Nouveau Front Populaire, qui garde toute son actualité, mais que certains à gauche, dans leurs déclarations récentes, semblent visiblement vouloir oublier… Ce "contrat de législature" a été adopté en France en juin 2024, à la veille des élections législatives anticipées, par quatre partis : les Ecologistes, la France Insoumise, le Parti Communiste Français et le Parti Socialiste, avec le soutien de Place Publique, Génération.s GES, GRS, MRC, LRDG, L'engagement, GDS, PEPS, Révolution écologique pour le vivant (REV), Allons enfants, ADES, Nouvelle Donne, La Jeune Garde, Union démocratque bretonne (UDB), ESNT et L'APRES. Nous citons ce paragraphe in extenso :
"Défendre l’Ukraine et la paix sur le continent européen
Pour faire échec à la guerre d’agression de Vladimir Poutine, et qu’il réponde de ses crimes devant la justice internationale : défendre indéfectiblement la souveraineté et la liberté du peuple ukrainien ainsi que l’intégrité de ses frontières, par la livraison d’armes nécessaires, l’annulation de sa dette extérieure, la saisie des avoirs des oligarques qui contribuent à l’effort de guerre russe dans le cadre permis par le droit international, l’envoi de casques bleus pour sécuriser les centrales nucléaires, dans un contexte international de tensions et de guerre sur le continent européen et oeuvrer au retour de la paix."