Justice. L’opposant russe Kara-Mourza, condamné à vingt-cinq ans de détention, “ne se repent de rien”

Figure très connue de l’opposition en Russie, lauréat en octobre 2022 du prix des droits de l’homme de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, le journaliste et homme politique Vladimir Kara-Mourza écope d’une peine particulièrement lourde, pour haute trahison.

Un tribunal de Moscou a condamné le 17 avril le journaliste et homme politique russe Vladimir Kara-Mourza (reconnu auparavant comme “agent de l’étranger” par la justice russe) à vingt-cinq années de colonie pénitentiaire à régime sévère pour “haute trahison”“diffusion d’informations mensongères sur l’armée russe” et “activité au sein d’une organisation indésirable”.

Comme le précise le quotidien moscovite Kommersant, l’opposant a également écopé d’une amende de 400 000 roubles (environ 4 500 euros) et d’une interdiction d’exercer le métier de journaliste pendant sept ans. Les audiences se sont déroulées à huis clos pour raison de secret.

Il s’agit de la première affaire en Russie où il est fait référence à la nouvelle rédaction de l’article du Code pénal sur la haute trahison. Selon ce dernier, peuvent tomber sous ce chef d’accusation “non seulement la transmission de données secrètes, mais aussi toute aide procurée à d’autres pays ou organisations dans le cadre d’une action dirigée contre la sécurité de la Russie”, ajoute le titre.

Vladimir Kara-Mourza, 41 ans, se trouvait en maison d’arrêt depuis avril 2022. D’abord inculpé pour “diffusion publique d’informations mensongère” après avoir accusé, “lors d’une intervention publique aux États-Unis, les forces armées de Russie de mener des actions militaires illégales”, les deux autres chefs d’accusation lui ont été imputés par la suite.

En tant que journaliste, Kara-Mourza a écrit dans les journaux russes Novaïa Gazeta et Nezavissimaïa Gazeta, il a conduit pendant quatre ans une émission sur la station de radio russe Écho de Moscou mais produisait aussi des tribunes dans les grands quotidiens américains. Comme homme politique, il a été vice-président du Parti de la liberté du peuple, membre du bureau du mouvement démocratique Solidarité et du Conseil de coordination de l’opposition russe. Il a cofondé avec l’ex-milliardaire russe en exil Mikhaïl Khodorkovski l’ONG Russie ouverte et rejoint la fondation Russie libre, créée aux États-Unis par des émigrés politiques russes. Il a été victime de deux tentatives d’empoisonnement, en 2015 et 2017.

Membre du Comité antiguerre de Russie

Depuis le début de la guerre en Ukraine, le 24 février 2022, il est membre du Comité antiguerre de Russie. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe lui a décerné, en octobre 2022, le prix des droits de l’homme Václav-Havel.

Selon le site russe RВKlors de sa dernière prise de parole, l’opposant a déclaré être “condamné pour ses opinions politiques” et qu’il “ne se repentait de rien”.

“Je souscris à chaque mot que j’ai prononcé et qui ont conduit à ces accusations. Je n’ai rien à demander à ce tribunal, je connais ma sentence, je la connaissais il y a un an quand j’ai vu dans le rétroviseur des hommes en uniforme et masque noir courir derrière ma voiture. Tel est le prix à payer aujourd’hui pour ne pas se taire.”

L’avocate Maria Eismont a annoncé qu’elle ferait appel du jugement. “Nous avons constaté de graves irrégularités de procédure”, a-t-elle déclaré, rapporte le site Vzgliad.